Daniel Mouranche, vice-président de l'association des usagers des transports d'Ile-de-France et président de Vivre à Meudon, met en parallèle les projets qui concernent la RD 7 et la RD 920. Notons que la procédure de concertation vient d'être prolongée par le Conseil général pour ce qui concerne la RD 920 et comportera en tout cinq réunions publiques ; la procédure de concertation RD 7, qui s'est appuyée jusqu'ici sur une information tronquée, se termine en principe le 15 décembre après seulement deux réunions publiques organisées par le Département.
Le Département a ouvert en même temps la concertation sur deux de ses routes : la RD7 sur Sèvres, Meudon et Issy-les-Moulineaux, la RD 920 sur Antony, Bourg-la-Reine et Sceaux. Les trafics sont équivalents, 20 à 40 000 véhicules /jour selon les tronçons, les propositions du Conseil général aussi dans le principe d'aménagement - même s'il s'agit dans un cas d'élargissement avec beaucoup de conséquences négatives et dans l'autre de rétrécissement :
- pour la RD7 où plus de la moitié du trajet est actuellement sur 2X1 voies, élargir pour tout passer à 2x2 voies
- pour la RD 920 où une bonne part du trajet est sur 2x3 voies, rétrécir pour pour tout passer à 2x2 voies.
Mais pourquoi un collectif de vingt associations demande-t-il 2x1 voies pour la RD 7 (option 3 inscrite à la concertation), et
personne n'ose-t-il le faire pour la D 920 ?
La réponse n'est pas à chercher dans l'idéologie
des Verts qui serait à la mode dans le Val de Seine, mais dans la maturité
de la réflexion développée par le collectif depuis 2002 avec l'assistance
d'experts. Restent aussi des considérations de terrain : le contexte urbain
est différent.
- La solution 2x1,5 voies avec giratoires sans feux pour une voie urbaine à grande circulation n'est pas idéologique mais très réaliste : tout le monde y gagne !
Deux précisions préalables :
Pourquoi 1,5 voie et non 1
voie ? D'abord parce qu'il
ne faut pas qu'un véhicule arrêté, voiture, bus ou camion, bloque la
circulation. C'est donc 5m50 au moins qu'il faut (11m pour 2x1,5), bien plus
qu'une voie classique de 3m50 et pas beaucoup moins que la 2 voies qui
fait au minimum 6m (12m pour 2x2). Mais la solution est efficace :
quand un camion doit s'arrêter sur la chaussée (secours, livraison,
accident, panne...), la pénalité sur le trafic est plus forte sur une 2x 2
voies sans bande d'arrêt que sur une 2x1,5 voies, à cause des changements de
file de la voie bloquée.
Ensuite parce que la demi-voie permet au vélo
de partager la chaussée avec la voiture de façon plus satisfaisante que
l' habituelle bande cyclable, plus étroite.
Pourquoi supprimer les
feux aux giratoires ? Parce qu'ils font perdre
du temps aux voitures, de la capacité à la voirie, de la santé aux
riverains enfumés et de l'espace public dont le meilleur usage n'est
certainement pas de stocker des voitures. La priorité aux sortants et
le ralentissement naturellement provoqué des entrants par des sinuosités et des
rétrécissements assurent le passage quasi continu de tous. La multiplication
des voies à l'entrée est toutefois souvent nécessaire : leur nombre (1, 2 ou 3)
dépend du volume du trafic croisé. Par contre une voie suffit toujours en
sortie et les entraves sont inutiles. Des feux hors carrefours pour aider
la traversée des piétons fragilisés (handicap, enfants, charges ...) ne sont
bien sûrs pas exclus, au moins pendant la période d'apprentissage des
différents usagers de la voirie.
Les voitures sont gagnantes : l'absence de feux
aux carrefours donne de la fluidité. Comme aujourd'hui sur la RD 7 là où il n'y
a qu'une voie par sens, il n'y a pas de saturation : une voie unique permet de
débiter 1800 véhicules à l'heure par sens, soit 43 000 véhicules jour avec un
taux d'utilisation moyen sur la journée de 50% (1800 x 2 x 24 x 50%). La
circulation est apaisée : plus de stop and go aux feux, plus de tentation de
dépasser les autres. Le stress est diminué : la ponctuation des giratoires et
l'impossibilité de doubler limitent naturellement la vitesse à moins
de 50 km/h, et la sensation de bouchons quand le trafic approche de la
saturation est moins forte puisque la réduction de vitesse est plus faible (la
capacité maximum est obtenue à la vitesse de 30-40 km/h : au delà, moins
de voitures peuvent passer).
Les vélos sont gagnants : d'abord parce que la
réduction de vitesse des voitures améliore leur sécurité, notamment aux
carrefours, ensuite parce que la demi voie (qui les accueille naturellement
mais sans exclusive) assure la continuité de leur itinéraire. La solution
n'exclut pas la création d'un deuxième itinéraire hors chaussée par exemple au
voisinage des écoles, ou pour la promenade.
Les piétons sont gagnants : comme pour les vélos
les voitures qui roulent moins vite sont moins dangereuses. Des îlots
centraux suffisent alors à rassurer la majorité des piétons. Aux carrefours,
les voitures arrivent plus échenillées du fait des sinuosités et
rétrécissements qui les ont ralenties. L'automobiliste est plus
attentif quand il n'a plus de feux à surveiller. Enfin, hors
carrefours, la traversée de 1,5 voies est plus courte que celle de 2
voies, surtout si aux points de traversée l'on renonce
provisoirement à permettre l'arrêt d'urgence des véhicules (mais pas à l'espace
du vélo : la chaussée de 5m50 mini peut alors être réduite à 4m50, peut
être 4m20).
Les bus sont gagnants : ils peuvent s'arrêter
n'importe où sur la section courante sans gêner (sous réserve de trottoirs
à la bonne hauteur pour l'accès aux personnes à mobilité réduite). Ils peuvent aussi en cas d'embouteillage
doubler les voitures par la droite. Il est vrai que
s'ils avaient avant un site propre, ils n'ont rien à
gagner.
L'espace public est gagnant : le gain
d'espace pris aux voitures est minime sur la section courante où il peut
ne pas dépasser une largeur d'1mètre (voir plus haut). Mais il y a deux
autres sources de gain : la dispense de piste cyclable continue, et la
réduction des longueurs de voies en surnombre à l'entrée des
carrefours puisque le besoin de stockage aux feux n'existe plus.
- La solution 2x1,5 voies ne peut pas
s'appliquer de la même façon sur la RD 7 et la RD 920 car les deux
routes n'ont pas le même environnement.
Le contexte est différent
: l'opération RD 7 retraite une route qui longe le fleuve, et
réalise aussi un aménagement paysager des berges pour la promenade, alors que
l'opération RD 920 retraite une route bordée des deux côtés par des
quartiers denses et ne réalise que des aménagements de voirie urbaine classiques
pour voitures, piétons, vélos et décorations vertes.
Le dessin de la solution 2x1,5 voies de la
RD 7, alternatif à la quatre voies que veut jusqu'ici implanter le Conseil général, a été défini avec l'aide du concepteur de la voirie nantaise et
expérimenté à petite échelle avec un succès incontesté au carrefour en T
de la rue de Vaugirard.
Pour la transposer de la RD 7 à la D 920,
plusieurs différences sont à prendre en compte :
- sur les carrefours : ils sont presque toujours
à 4 branches sur la RD 920 et à 3 branches (c'est à dire en T) sur la RD7.
Donc il y a en moyenne plus de trafic à traiter dans les giratoires :
ils devront être plus grands (voir l'exemple du giratoire double à Rueil) ;
- sur les bus : encore inexistants sur la RD 7,
ils sont très nombreux sur la RD 920 (mais pas encore assez à Antony). Des
sites propres sont manifestement utiles sur la RD 920, surtout à Antony,
ce qui conduit à une alternative de type 2 x 2,5 voies, peut être 2 x
2,25, ou encore ce qui revient quasiment au même 2 fois 2 dont 1 en couloir
franchissable bus-vélo ...
- sur les piétons : mis à part l'habitat
fluvial, ce sont des promeneurs pour la RD 7 à Meudon. Ils se satisfont donc plus
facilement d'un nombre limité de traversées spécialement protégées, et sont a
priori moins exposés à l'inattention quand ils sont confrontés à un trafic
routier intense ;
- sur le stationnement : pour la même
raison, il peut plus facilement être regroupé et unilatéral pour la RD 7 que
pour la RD 920.
- sur la régularité du trafic : compte tenu des
commerces il y a plus d'arrêts pour livraison ou achat sur la RD 920, ou de
véhicules en maraude, et ils se produisent des deux côtés. Le trafic
est donc plus souvent perturbé. Des contre-allées sont probablement
plus souvent utiles, y compris pour le stationnement.
Daniel Mouranche
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