L'intercommunalité dans les Hauts-de-Seine est structurée aujourd'hui en 34 groupements, dont cinq communautés d'agglomération : par ordre décroissant de population, Arc de Seine (en vert sur la carte), Les Hauts-de-Bièvres (en jaune sur la carte), Sud de Seine (en rose sur la carte), Val de Seine (en bleu roi sur la carte) et Coeur de Seine (en bleu ciel sur la carte). S'y ajoute la communauté de communes de Châtillon-Montrouge (en blanc sur la carte).
Des évolutions notables se dessinent. Dans le centre du département, le projet de fusion entre Arc de Seine et Val de Seine, s'il est validé en l'état par l'autorité préfectorale et les assemblées délibératives, créera un ensemble de près de 300 000 habitants, soit le cinquième de la population du département. Un peu plus au nord, au dessus de Coeur de Seine qui unit Garches, Saint-Cloud et Vaucresson en un groupement de 55 000 habitants seulement, les communes de Rueil-Malmaison (74 000 habitants) et de Suresnes (40 000 habitants) ont annoncé leur intention de fonder
ensemble à très brève échéance une nouvelle communauté d'agglomération (en pointillés ocres sur la carte).
Cinq communes au moins du nord du département mènent par ailleurs d'actifs travaux de rapprochement : Asnières, Bois-Colombes, Clichy-la-Garenne, Colombes et Gennevilliers. Ont aussi été pressenties pour participer à cette démarche les communes de La Garenne-Colombes, Villeneuve-la-Garenne et, dans le département voisin, Saint-Ouen. Cette démarche s'inscrit dans une histoire heurtée : en 2003, le conseil municipal de Levallois-Perret, relayé par la préfecture, s'était pour sa part prononcé pour la constitution d'une intercommunalité regroupant onze communes dans le nord des Hauts-de-Seine. Projet peu concerté et qui n'avait pu aboutir.
Ces perspectives s'inscrivent dans le cadre des lois de 1999 et 2004 qui ont créé puis renforcé le cadre des communautés d'agglomération, et dans le cadre des réflexions en cours sur les niveaux territoriaux pertinents.
Le coeur de la loi de 1999 sur la coopération intercommunale était de fonder, avec les communautés d'agglomération, un "espace de solidarité, en vue d'élaborer et conduire ensemble un projet commun de développement urbain et d'aménagement de leur territoire". La loi, qui au demeurant n'était guère conçue pour s'appliquer à la région Ile-de-France puisqu'elle était axée autour d'un concept de "ville-centre", fixait un seuil minimal de 50 000 habitants sur un territoire sans enclaves et laissait les maires décider des territoires pertinents, en lien avec l'autorité préfectorale et les commissions départementales de coopération intercommunale. Dans les Hauts-de-Seine, l'autorité préfectorale est intervenue sur certains points, mais même l'impératif légal de continuité territoriale n'a pas été respecté, comme le montre l'enclave que constitue la communauté de communes de Châtillon-Montrouge dans la communauté d'agglomération Sud de Seine.
Deux questions majeures se posent aujourd'hui pour la poursuite de l'intégration intercommunale :
- quels territoires pertinents ?
Il est radicalement différent pour les équilibres territoriaux d'envisager, par exemple pour le centre du département 1)une fusion Arc de Seine / Val de Seine d'un côté, la subsistance de Coeur de Seine et la création d'une communauté autonome Rueil / Suresnes de l'autre 2) une fusion Arc de Seine / Val de Seine / Coeur de Seine qui couvrirait quasiment le périmètre du schéma de cohérence territorial, à côté d'une nouvelle communauté bicéphale Rueil / Suresnes 3) une fusion Arc de Seine / Val de Seine d'un côté, une fusion Coeur de Seine / Rueil / Suresnes de l'autre. Pour ne rien dire d'autres configurations incluant, notamment, Nanterre. Dans le flou ambiant sur les objectifs de l'intercommunalité, accru jusqu'ici par des projets territoriaux et des solidarités en demi-teinte, l'influence personnelle de tel ou tel élu risque d'être déterminante, sans qu'elle réponde nécessairement à un optimum en termes d'aménagement du territoire.
- quelle gouvernance ?
Les communautés d'agglomération sont jusqu'ici des objets politiques non identifiés. Elles ont absorbé, là où elles existent (19 communes sur 36 dans les Hauts-de-Seine) une bonne part des compétences communales, sans doute à juste titre au regard de l'utilité de principe d'une mutualisation des compétences, et de l'impossibilité pour les communes de travailler de façon territorialement pertinente en vase clos. Mais elles n'ont pas le statut de collectivités territoriales. Au delà, la loi de 1999 qui les a fondés comporte une lacune grave : elle ne prévoit pas de représentation obligatoire des oppositions municipales et ferme ainsi les communautés d'agglomération aux règles démocratiques les plus communément admises. Lacune étrange d'ailleurs puisqu'elle ne vaut pas pour les communautés urbaines, qui sont des intercommunalités comparables à plus grande échelle... Il en résulte, là où les maires le décident, un verrouillage complet des décisions vis-à-vis des élus municipaux. Et dans les communautés dont les maires "réservent" gracieusement une place à l'opposition, celle-ci est réduite à siéger en quelque sorte par faveur, ce qui minore nettement ses capacités d'action.. parfois même, il y a directement "sélection" des élus d'opposition par les maires, et ceux qui seraient le plus capables d'analyser les situations et porter des projets se voient de fait écartés. Ainsi pourquoi, à Vanves, l'ancien maire et actuel chef de file de l'opposition n'a-t-il pu siéger à Arc de Seine ? De telles anomalies caractérisent malheureusement des structures dirigées par des maires de toutes tendances politiques, même si elles sont accentuées ici ou là par des élus peu sensibles au fonctionnement démocratique.
Habitants ou élus des villes en intercommunalité, nous pouvons agir: demandons aux parlementaires d'imposer enfin une représentation démocratique au sein des communautés d'agglomération - signez et diffusez l'appel publié sur democratielocale.com ! (déjà près de 450 signataires en quelques jours)
Au delà, c'est à l'occasion de l'extension des intercommunalités une véritable réflexion sur la démocratie locale qu'il faut mener.
En termes d'institutions d'une part : l'échelon communal, souvent trop étroit, est pourtant une strate précieuse de proximité et surtout la seule dont l'action soit à peu près perceptible par la plupart des habitants. L'intercommunalité a jusqu'ici échoué dans ses objectifs premiers de mutualisation des coûts et d'articulation de projets, elle reste de plus timorée en matière de solidarité : avant d'en accroître l'assise, il faudrait au moins comprendre pourquoi. L'action des autres niveaux territoriaux est, souvent, insuffisamment lisible. Et dans certains cas incongrue : pourquoi par exemple, alors que les maires sont compétents en matière de police locale comme de tranquillité et de sécurité publiques, est-ce en matière d'aménagements de voirie le Conseil général qui imposerait des solutions parfois dénuées de tout lien avec la sécurité et la tranquillité publiques ? Ainsi d'ailleurs qu'avec les objectifs d'aménagement du territoire qui ressortissent de la région ?
Au delà des institutions, il faudra, un jour de préférence pas trop lointain, s'interroger enfin sérieusement sur la capacité de chaque citoyen à au moins connaître les décisions qui influent directement sur ses conditions de vie et la manière dont elles sont arrêtées, au mieux à avoir, quand il veut s'y investir, le pouvoir d'y participer.
Commentaires
Vous pouvez suivre cette conversation en vous abonnant au flux des commentaires de cette note.