Au conseil communautaire d’Arc de
Seine jeudi soir, a été annoncé aux élus le lancement de la procédure de fusion
d’Arc de Seine et Val de Seine. Le 18 décembre, c’est-à-dire trois semaines
après l’annonce officielle dans la presse du projet de fusion, présenté déjà en
novembre comme une décision. Décision prise donc, sans aucune ambiguïté, avant toute consultation des élus hormis les maires eux-mêmes. Quant aux populations concernées, elles n'ont pas pu se prononcer puisque la fusion n'était pas proposée dans les programmes politiques dans la toute récente campagne municipale.
Le budget cumulé d'Arc de Seine et Val de Seine est de 300 millions d’euros, si les deux agglomérations sont réunies elles
regrouperont près de 300 000 habitants. Pour quelles décisions, prises de
quelle façon ?
La création des communautés
d’agglomération avait en principe trois objectifs :
mutualiser certaines compétences et permettre ainsi des économies de gestion
mutualiser les ressources locales trop inégales de taxe professionnelle, alors que des communes qui en perçoivent peu ont parfois de lourdes charges
- regrouper des territoires plus
vastes que les communes autour d’un projet territorial.
forte des dépenses de fonctionnement (cf rapport 2005 de la Cour des Comptes, rapport Attali, rapport parlementaire Quentin-Urvoas d’octobre 2008), et hausses très considérables de coût pour des compétences pourtant mises en commun : comme analysé par exemple l’an dernier à propos du vote du budget d'Arc de Seine, +40% pour le budget de nettoyage urbain en 2007, + 40% pour la gestion du Palais des sports d'Issy-les-Moulineaux mais de gestion communautaire, + 20% pour le budget "ordures ménagères" l'année précédente, etc.
La mutualisation des ressources de taxe professionnelle reste quant à elle limitée. Les villes riches se comportent comme si elles étaient la source de toutes les ressources des agglomérations, alors que ces structures sont aussi financées notablement par des dotations d'Etat. La dotation de solidarité communautaire, qui permet en principe de mutualiser la richesse entre les communes membres, n'est pas obligatoire ; à Arc de Seine elle existe mais est versée principalement à... Issy-les-Moulineaux, ne contribuant ainsi que faiblement à un rééquilibrage financier entre les communes de l'agglomération.
Quant au projet d'Arc de Seine, il est affirmé. Mais quelle est aujourd'hui sa réalité ? L'un des axes du projet concerne le développement durable ; dans la réalité, la subvention de toute la communauté à l'agence locale de l'énergie est bien plus faible que celle qu'Arc de Seine verse, par exemple, à l'association arménienne de football d'Issy-les-Moulineaux (dont l'intérêt communautaire n'échappera sans doute à personne). Quelle concordance entre les affichages et les actes ?
Jeudi soir, c'est non seulement la décision de fusion elle-même qui a été annoncée, mais les contours de la future agglomération - en anticipation sur le rôle de la préfecture, et sur des délibérations à venir. Le périmètre proposé est celui des sept communes qui composent aujourd'hui les deux agglomérations : Boulogne-Billancourt, Chaville, Issy-les-Moulineaux, Meudon, Sèvres, Vanves, Ville d'Avray. Les compétences seront toutes celles qu'exerçaient jusque là l'une ou l'autre des communautés - contrairement à ce qui a été indiqué en séance, ce n'est pas une obligation légale, la rétrocession d'une partie de ces compétences aux communes est tout à fait possible. Au delà, et là encore en anticipation des décisions à venir qui relèvent des conseils élus, c'est le contour de certaines compétences (dit "intérêt communautaire") qui a été d'ores et déjà annoncé : André Santini s'est ainsi hâté de préciser que le Palais des sports d'Issy-les-Moulineaux et le CUBE, structure tout aussi isséenne, resteraient d'intérêt communautaire. Annonce que les contribuables de Boulogne et Sèvres apprécieront certainement... si bien sûr ils en sont informés.
Faute de véritable projet aujourd'hui à Arc de Seine - cette structure est jeune, il ne faut pas lui demander tout en même temps, mais pourquoi accepter son opacité et les décisions budgétaires contraires aux orientations de base - quel projet demain pour les deux agglomérations unies ?
Selon André Santini jeudi, "porter des projets d’envergure qui répondent à des projets de développement". Pourquoi pas, à suivre. "Travailler à la réhabilitation des berges de la Seine", dans un "laboratoire d'action du Grenelle de l'environnement". Si c'est le cas, bravo ! On sait qu'Arc de Seine et, au sein d'Arc de Seine, Issy-les-Moulineaux ont joué un rôle positif dans le dossier de la RD7, souhaitant un aménagement en 2x1,5 voies et commandant une étude pour l'implantation d'aménagements innovants et sûrs en mini-giratoires. André Santini semble malheureusement avoir oublié entre temps l'esprit qui l'animait alors. Si les travaux préparatoires pour l'agglomération en préparation sont l'occasion d'affirmer clairement vis-à-vis du Conseil général une volonté d'aménagement doux et durable en lieu et place de l'autoroute urbaine qui a la préférence obstinée de quelques techniciens départementaux, ce sera d'excellent augure pour des perspectives d'actions positives.
Et enfin, "avoir un poids équivalent à la Défense". On ne sait si cette perspective a de l'intérêt pour les habitants des sept villes. André Santini en est sûr, "tout le monde est pour". Le président de la communauté d'agglomération doit posséder des dons extrasensoriels pour le savoir, puisque personne n'a été consulté. Il est vrai qu'il est également sûr d'agir mieux que d'autres élus - par exemple, que "le maire de Clamart, qui a précipité sa commune dans une intercommunalité sans intérêt" (sic). Et que faute d'avoir consulté les élus avant de décider, il informera ensuite : "Bien sûr nous informerons nos concitoyens" (c'est trop gentil). Quant à Denis Badré, l'absence de travail avec les élus ne l'inquiète pas. Selon lui pourtant, "l'échelon intercommunal n'est pas un échelon, c'est une forme d'organisation de l'échelon communal". Ah bon ? Mais si c'est le cas, pourquoi supprimer au niveau intercommunal les mécanismes démocratiques qui existent au niveau communal...
Deux questions essentielles au moins, concernant ce projet de fusion, sont dans l'ombre:
- quelles conditions financières, et quelles conséquences financières - qui ne seront pas nécessairement les mêmes partout - pour les habitants de chaque ville ?
- quel projet réellement recherché - au regard des orientations budgétaires et pas seulement des annonces politiques ?
En tout état de cause, une représentation démocratique correcte au sein de la future structure est indispensable pour, a minima, y assurer une prise de décision autrement qu'en club. Cette représentation démocratique n'est pas aujourd'hui obligatoire, elle n'est plus assurée à Arc de Seine depuis mars dernier.
"D'autres communautés d'agglomération ne font pas mieux" dit André Santini. Pour certaines non, hélas. Allons, Monsieur le Président, est-ce là l'expression de l'ambition d'exception que vous affichez ?
Les conditions de préparation de la fusion Arc de Seine Val de Seine sont en tous cas une illustration parmi d'autres d'une nécessité : celle de doter les communautés d'agglomération d'une règle normale de démocratie. Signez l'appel aux parlementaires demandant une représentation démocratique au sein des communautés d'agglomération sur www.democratielocale.com.
Je vous invite à visionner les 10 dernières minutes du conseil municipal de décembre 2008 de Boulogne Billancourt (accessible en ligne sur le site de la ville): l'un des deux conseillers d'opposition qui siègent à la CAVDS a présenté sa démission car il ne s'estimait pas en mesure d'assumer sa mission.
Le président de son groupe a donné le nom d'une autre conseillère municipale à même de le remplacer.
La suite est incroyable mais vraie: la majorité s'est opposée à cette candidature et a présenté une candidate maison, en lieu et place donc d'un élu d'opposition. Face à cette levée de boucliers, le conseiller démissionnaire est revenu sur sa décision.
Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles, et augure donc fort bien de la future gouvernance Arc de Seine-Val de Seine, à propos de laquelle du reste le maire de Boulogne Billancourt n'a pas voulu apporter d'éclaircissements en conseil municipal: arbitraire et coups de force, dans l'intérêt des habitants, bien sûr!
Rédigé par : anne-sophie catalan | 26 décembre 2008 à 15:16
Bravo et merci ! Allons ensemble dans le bon sens, si vous voulez diffusez svp également sur votre blog l'appel aux parlementaires "Pour une représentation démocratique dans les conseils d'agglomération", (lien sur www.democratielocale.com). Il est temps, a minima, de faire ce pas vers un peu plus de démocratie locale, et de passer de l'alerte à l'action.
Rédigé par : Béatrice Buguet | 22 décembre 2008 à 14:54
Il est toujours utile de sensibiser à ce pb démocratique. J'avais fait de même sur mon blog à Boulogne-Billancourt : http://www.sylvaincanet.fr/2008/11/issy-boulogne-d.html
A bientôt
Rédigé par : Sylvain Canet | 22 décembre 2008 à 14:47